« L’annonce de ce sommet intervient au lendemain des affirmations de Washington selon lesquelles l’Iran s’apprête à fournir des drones de combat à l’armée russe. Un excellent moyen, affirme le quotidien moscovite “Kommersant”, de fâcher le Kremlin avec les pays arabes » rapporte Courrier International du 13 juillet 2022.
Vladimir Poutine se rendra bien à Téhéran la semaine prochaine pour un sommet tripartite avec ses homologues turc, le président turc Recep Tayyip Erdogan, et iranien, Ebrahim Raïssi, a confirmé ce 12 juillet le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
“Le déplacement du président en Iran est en train d’être préparé. Il y aura une réunion des chefs d’État, les garants du processus d’Astana. Il s’agit, comme vous le savez, d’un mécanisme visant à régler le conflit syrien”, a dit Peskov, ajoutant que des contacts bilatéraux auront lieu avec les dirigeants iraniens ainsi qu’une réunion trilatérale entre les présidents.
Ce sommet, que le quotidien moscovite Kommersant a déjà qualifié de “triangle persan”, aura lieu le 19 juillet prochain :
“La nouvelle a coïncidé avec le fait que le conseiller à la sécurité nationale de la Maison-Blanche, Jake Sullivan, a annoncé que l’Iran s’apprêtait à fournir à la Russie un lot important de drones de combat. Le responsable américain n’a étayé d’aucune preuve ses propos, mais le moment de sa déclaration était important – à la veille de la visite du président américain, Joe Biden, au Moyen-Orient, où il prévoit d’aborder la question de la lutte contre l’expansion régionale de Téhéran. La nouvelle de l’acquisition éventuelle de drones iraniens par la Russie pourrait être mal accueillie au Moyen-Orient et utilisée pour discréditer Moscou aux yeux de ses partenaires arabes.”
Pour Vladimir Poutine, qui s’est rendu fin juin au Tadjikistan, il s’agira du deuxième voyage à l’étranger depuis le début de la guerre en Ukraine. L’annonce de ce prochain sommet intervient également au lendemain d’un accord à l’ONU portant sur l’extension pour six mois d’un mécanisme d’aide transfrontalière à la Syrie, dont Moscou avait initialement bloqué le renouvellement.
Aussi, comme le souligne Kommersant, le sommet de Téhéran se tiendra alors que Recep Tayyip Erdogan menace depuis des semaines de lancer une nouvelle opération militaire contre des combattants prokurdes dans le nord de la Syrie, une “opération qui peut rebattre les cartes” dans la région.
Comment fâcher Moscou avec les pays arabes
Selon le grand journal économique de Moscou, les Américains ont enfin, avec cette histoire de drones, un argument de poids pour tenter de “fâcher les pays arabes avec la Russie” :
“L’une des questions les plus douloureuses entre Téhéran et les pays arabes est l’utilisation de drones iraniens par les Houthis du Yémen pour frapper les territoires saoudien et émirati, ainsi que l’utilisation de ces drones par divers groupes chiites en Irak contre des installations militaires occidentales.”
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L’Iran n’a toujours pas confirmé l’envoi de ses drones mais, sur le fond, leur acquisition par les forces armées russes serait une “très bonne idée”, estime l’expert militaire russe Iouri Liamine, interrogé par le journal.
“Le déroulement des hostilités en Ukraine prouve une fois de plus que les appareils sans pilote sont nécessaires à de nombreux égards”, affirme-t-il en rappelant que l’Iran est devenu ces dernières années l’un des leaders mondiaux en la matière :
“Ayant subi des sanctions pendant des années, l’Iran a fait de la production de drones l’une de ses priorités, compensant ainsi le manque d’avions de combat et d’hélicoptères modernes.”
Courrier International, 13 juillet 2022, Photo/Mikhail Metzel/Sputnik