Une célèbre avocate a été placée en garde à vue lundi après s’en être prise à la charia sur les réseaux sociaux. Feyza Altun, une avocate qui défend avec véhémence la laïcité mise à mal dans la Turquie du président Recep Tayyip Erdogan, risque une peine de prison si l’enquête qui la vise aboutit à un procès.
Avec RFI correspondante à Istanbul, Anne Andlauer
Il a suffi de deux mots sur le réseau social X. Le mot « charia », précédé d’une insulte, pour que l’avocate Feyza Altun, connue pour ses prises de position féministes, se retrouve en garde à vue.
Le parquet de Beykoz, à Istanbul, s’est autosaisi pour ouvrir une enquête sur la base de l’article 216 du Code pénal turc. De plus en plus souvent invoqué, il punit ceux qui « dénigrent ou incitent à la haine ou à l’hostilité ». Selon la qualification choisie, la peine encourue peut aller jusqu’à trois ans de prison.
Sur les réseaux sociaux, détracteurs et défenseurs de l’avocate se prennent à partie en usant des mots-dièses « la prison pour Feyza Altun » ou, à l’inverse, « Feyza Altun n’est pas seule ». Elle-même a publié un message dans lequel elle maintient ses propos en expliquant que la Turquie est un État laïc et que réclamer la charia « est un crime et une menace pour l’ordre constitutionnel ».
Début février, le président Erdogan s’en était pris dans un discours aux « ennemis de la charia », qu’il avait définie comme « l’ensemble des règles de vie de l’islam ». Tout en assurant que chacun était libre de croire ou pas, le dirigeant turc avait estimé que « l’hostilité à la charia n’est rien d’autre qu’une hostilité envers la religion elle-même. »
(Feyza Altun a été libérée par décision de la cour en début de matinée du 20/02/2024 ndlr)