Turquie : la radio indépendante Açik Radyo forcée de rendre l’antenne / Raphaël Boukandoura / OUEST FRANCE

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Média historique et porte-voix de la société civile, la radio est victime de la censure qui frappe les médias non affiliés au pouvoir.

OUEST FRANCE, le 14 octobre 2024

Alors qu’elle allait fêter le mois prochain ses trente ans d’existence, Açik Radyo (Radio ouverte) est désormais fermée. Le Haut Conseil pour la radio et la télévision, une instance très proche du pouvoir, a ainsi décrété, vendredi 11 octobre, la fermeture de la fréquence accordée à la station. Cette radio a été sanctionnée au motif que l’expression de génocide arménien a été employée au cours d’un de ses programmes et a refusé d’appliquer une suspension de cinq jours de cette émission.

La sanction qui frappe cette radio stambouliote qui compte plus d’un million d’auditeurs et met l’accent sur la société civile, l’écologie, les droits des femmes est un coup dur pour le paysage médiatique turc. Nous étions la dernière radio FM indépendante ; c’est le droit de nos auditeurs à accéder à l’information qui est remis en cause », estime Ilksen Mavituna, rédacteur en chef.
La perte de la fréquence est irrémédiable. Pourtant les collaborateurs de ce média financé à plus de 50 % par ses auditeurs, entendent bien continuer à diffuser leur contenu sur internet, même s’ils savent qu’ils perdront une partie de leurs auditeurs, notamment les plus âgés.

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Une pression constante sur les médias

Le pouvoir islamo-nationaliste de Recep Tayyip Erdogan s’est lancé depuis 10 ans dans une campagne de contrôle et de censure des voix dissidentes.

« Il y a une intention claire de la part du pouvoir de réduire la pluralité médiatique, déjà très diminuée ces dernières années, et de ne faire entendre qu’un seul discours officiel », estime Erol önderoglu, représentant en Turquie de l’ONG Reporters sans Frontières. Les amendes contre les rares chaînes de télévision d’opposition comme les refus d’octroyer des cartes de presse aux journalistes d’oppositions se multiplient. Tout comme les procès pour diffamation, pour insulte au président de la République et même pour propagande terroriste. Cette dernière accusation concerne surtout les journalistes kurdes, comme Serhildan Andan, arrêté vendredi 11 octobre à son domicile à Diyarbakir, la grande ville kurde de l’est du pays.

L’on note aussi de plus en plus de menaces circonstanciées contre des journalistes, surtout les journalistes d’investigation, qui se plongent dans les affaires de corruption ou qui s’intéressent de trop près aux confréries religieuses ou à des proches du pouvoir », déplore Erol önderoglu. C’est le cas du journaliste Murat Agirel, victime de menaces de morts, ou de la journaliste Sule Aydin, régulièrement harcelée sur les réseaux et cible de menaces de violences sexuelles, comme le 11 octobre sur le mur extérieur de son appartement.

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