Un rassemblement hautement symbolique samedi en Turquie : pour la 1 000e fois, des proches de “disparus” se sont réunis sur l’avenue Istiklal d’Istanbul. Un rassemblement interdit, mais qui a lieu chaque semaine depuis 1995
France Info, le 27 mai 2024, par Anne Andlauer
Depuis bientôt 30 ans, l’image n’a pas changé : chaque samedi, des mères, des filles, des frères ou des fils de personnes disparues après un placement en garde à vue dans les années 1980 et 1990, se réunissent avec la photo de leur proche et un œillet rouge dans la main.
Leurs revendications non plus, au sein du groupe dit des « Mères du samedi », n’ont pas changé : savoir ce qui est arrivé, et juger les responsables s’ils sont encore en vie. Leur manifestation est la plus ancienne de Turquie et l’une des plus anciennes du monde. « Cette situation est une honte pour la Turquie, dénonce Faruk Eren, dont le frère Hayrettin n’a plus donné de signe de vie depuis une garde à vue en 1980. Nous cherchons la tombe de nos proches et au lieu de ça, depuis 1 000 semaines, l’Etat continue de nous dire que personne n’a disparu en garde à vue. »
Depuis 2018, le rassemblement est interdit et régulièrement réprimé. Mais Faruk Eren insiste : les enjeux de leur double quête, de justice et de vérité, sont loin de concerner les seules familles de disparus.
« Si l’Etat n’affronte pas ce passé, ne reconnaît pas la vérité, la Turquie ne connaîtra jamais la démocratie. » Faruk Eren à franceinfo
Depuis trois ans, pourtant, ces familles en quête de justice sont elles-mêmes jugées et risquent la prison pour » violation de la loi sur les manifestations ».