«Nous sommes ici avec 300 000 personnes» : à Istanbul, l’opposition dans la rue pour dénoncer l’arrestation du maire de la ville turque/LIBERATION/AFP

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Libération, le 22 mars 2025

Ce vendredi 21 mars, des appels à manifester avaient été lancés dans 45 villes de Turquie, trois jours après l’arrestation d’Ekrem Imamoglu, rival d’Erdogan. La mobilisation a été massive et des incidents ont éclaté dans les principales communes du pays.

Une foule monstre. Et un pouvoir autoritaire qui vacille. Ce vendredi 21 mars, en fin de journée, les manifestants ont afflué par vagues devant l’hôtel de ville d’Istanbul pour dénoncer l’arrestation du maire d’opposition, Ekrem Imamoglu. «Nous sommes ici avec 300 000 personnes», a clamé Özgür Özel, le chef du Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate), principale formation d’opposition dont est issu Ekrem Imamoglu. Selon l’outil en ligne de comptage de foule Mapchecking, au moins plusieurs dizaines de milliers de personnes se sont pressées aux abords immédiats du siège de la municipalité.

La fermeture de ponts et de plusieurs voies d’accès décidée par les autorités avait selon le CHP empêché nombre de manifestants de rejoindre le site pour la troisième nuit consécutive, en dépit des avertissements du président turc, Recep Tayyip Erdogan. «Ne te tais pas sinon ce sera bientôt ton tour !» ont chanté les manifestants, brandissant des pancartes sur lesquelles on pouvait lire «N’ayez pas peur, le peuple est là» ou encore «Droit, loi, justice». «Nous ne donnerons pas notre aval à ce coup d’Etat judiciaire», a lancé Özgür Özel, alors que le CHP s’apprêtait à désigner dimanche Ekrem Imamoglu comme son candidat à la prochaine élection présidentielle.

Accusé de «corruption» et de «terrorisme», le maire a été auditionné plusieurs heures ce vendredi selon son entourage. Il devrait être présenté samedi soir à un juge, d’après des médias turcs. Toujours selon ces derniers, le maire d’Istanbul a affirmé lors de sa déposition n’«avoir commis aucun crime», selon des propos rapportés par des médias proches de l’opposition. Ses partisans redoutent qu’il puisse être incarcéré à l’issue de sa garde à vue dimanche et remplacé par un administrateur nommé par l’Etat. Cinq maires CHP de districts d’Istanbul ont été arrêtés ces derniers mois, dont trois ont été placés en détention, et dix du parti DEM prokurde ont été remplacés par des administrateurs.

«La Turquie ne sera pas livrée à la terreur de la rue»

Des appels à manifester avaient été lancés dans plus de 45 villes à travers le pays et des incidents ont éclaté à Istanbul, Ankara et Izmir, la troisième ville du pays, où comme dans la capitale la police a fait usage de canons à eau. La télévision publique TRT a diffusé des images des manifestations pour dénoncer les «provocateurs». Au total, des manifestations se sont tenues depuis mercredi dans au moins 40 des 81 provinces du pays, selon un comptage de l’AFP.

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«La Turquie ne sera pas livrée à la terreur de la rue», s’était insurgé plus tôt vendredi le président Erdogan, affirmant que les manifestations mèneraient à une «impasse». Le ministre de la Justice, Yilmaz Tunç, a pour sa part qualifié d’«illégaux et inacceptables» les appels répétés de l’opposition à manifester.

Cette contestation intervient un an après la débâcle subie par le Parti de la justice et du développement (AKP) du président Erdogan lors d’élections municipales, dans un contexte de crise économique. Les évènements ont pesé sur la Bourse d’Istanbul, qui a perdu plus de 16,5 % cette semaine, un plongeon inédit depuis 2008 selon des économistes.

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