Asie.Visions, n° 116, octobre 2020.
« La Chine et la Turquie ont, à première vue, de nombreux intérêts à coopérer. Le déploiement des “Nouvelles routes de la soie” chinoises, les besoins colossaux d’investissements et de financements de la Turquie, ainsi que la défiance du Président Erdogan face à l’Occident apparaissent comme autant d’intérêts convergents. Pourtant la coopération économique entre les deux pays peine à accomplir tout son potentiel. Des divergenges politiques persistent, dont particulièrement la question des Ouïghours.
Les relations entre la République populaire de Chine, grande puissance économique et diplomatique dont la réémergence sur la scène internationale est l’un des sujets incontournables de la politique internationale, et la Turquie, puissance régionale dont le poids est non négligeable dans les équilibres de la Méditerranée orientale, offrent une vision complémentaire pour l’étude des relations internationales contemporaines. L’évolution de ces relations met en lumière les instruments et les priorités de la Chine en matière de politique étrangère, en l’occurrence en Méditerranée orientale. Quant à la Turquie, étudier ses relations avec le géant asiatique apporte une vision supplémentaire de sa nouvelle politique étrangère sous Recep Tayyip Erdoğan, marquée par des crises à répétition avec ses alliés occidentaux traditionnels.
La dimension économique apparaît prioritaire dans les relations sino-turques, la Chine étant devenue, ces dix dernières années, l’un des trois plus grands partenaires commerciaux de la Turquie avec l’Allemagne et la Russie. Même si la Turquie ne semble pas être prioritaire pour la diplomatie chinoise, elle reste quand même un acteur important à ses yeux, en raison de son marché intérieur de 83 millions d’habitants, mais surtout avec son positionnement géographique. Cette position est d’autant plus intéressante aujourd’hui pour la Chine dans le cadre du déploiement des « Nouvelles routes de la soie ».
Par ailleurs, la question ouïghoure fait que les relations entre ces deux États ne sont pas uniquement cantonnées à la sphère économique. Elle ajoute un volet de politique intérieure qui, d’une part, touche les sensibilités des segments nationalistes de l’opinion publique turque, et de l’autre, suscite des craintes liées à la sécurité nationale en Chine. Par conséquent, il existe des obstacles sérieux à un rapprochement plus poussé des deux pays.
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