Nora Seni, pour l’Observatoire de la Turquie contemporaine, 7 avril 2021
Ursula Von der Leyen présidente de la Commission européenne et Charles Michel président du Conseil européen étaient à Ankara pour s’entretenir avec Erdoğan à un moment où les relations entre l’Europe et la Turquie sont au plus bas. Parmi les principaux points de discorde figurait la décision prise par Erdoğan, il y a deux semaines, de retirer la Turquie de la convention d’Istanbul de 2011, un traité international visant à prévenir la violence à l’égard des femmes
Une fois dans le salon de la réunion le président du Conseil européen Charles Michel et le président turc s’assoient sur les deux chaises préparées côte à côte, laissant la présidente de la Commission européenne, seule debout, face aux deux hommes.
Ursula von der Leyen sera installée alors dans un canapé, face à Mevlüt Çavuşoğlu, le ministre des Affaires étrangères, loin d’Erdogan et de Michel. Pourtant, le rang protocolaire d’Ursula von der Leyen et Charles Michel est exactement le même, comme cela a été confirmé par le porte-parole de la Commission européenne, Eric Mamer, ce mercredi.
« Et non, ce n’était pas une coïncidence, c’était délibéré », a déclaré sur Twitter Sophie in ‘t Veld, membre néerlandaise du Parlement européen. « Pourquoi le @eucoprésident (Michel) s’est-il tu ? »
C’est toute la question. Venant du président turc qui a imprimé sa vision hiérarchique des sexes sur son pays cela n’étonnera pas. Surtout si on tient compte du goût d’Erdogan pour les provocations qui donnent du grain à moudre aux opinions pendant qu’il avance ses pions.
Que dire en revanche du silence, de l’inaction de Charles Michel? Il sonne comme l’aveu de l’abdication de l’UE, du renoncement à ses valeurs face à un habile stratège à qui il a suffit de retirer ses bateaux de la Méditerranée pour que lui rendent visite deux représentants des vingt-sept pays européens avec en offrande « un plateau d’argent chargé de présents,, comme les émissaires allaient au palais de Topkapi au temps de l’empire. » (Marc Pierini)
La crainte de heurter Erdogan a fait oublier à Charles Michel le rang protocolaire de la présidente de la Commission européenne. Eric Mamer porte-parole de la Commission européenne a déclaré » Madame Von der Leyen aurait du être traité exactement de la même manière que Michel. » Il a oublié qu’ils étaient à Ankara aussi pour s’entretenir du retrait de la Turquie de la Convention d’Istanbul. Il a oublié les codes de la simple politesse.
Des oublis qui confessent l’abandon par l’Europe des partisans de la démocratie en Turquie.