Le président égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, a accueilli au Caire son homologue turc Recep Tayyip Erdogan pour la première fois depuis sa prise de pouvoir en 2013. Après dix ans de brouille, les deux dirigeants ont signé plusieurs accords, une augmentation des échanges commerciaux et une coopération diplomatique au Moyen-Orient et en Afrique.
Première poignée de mains en une décennie. Alors que les deux pays étaient brouillés, les présidents égyptien Abdel Fattah al-Sissi et turc Recep Tayyip Erdogan ont annoncé, mercredi 14 février, au Caire, ouvrir « une nouvelle page » dans leurs relations.
En 2013, quand Abdel Fattah al-Sissi, alors chef de l’armée, renversait l’islamiste Mohamed Morsi, grand allié de Recep Tayyip Erdogan, ce dernier avait juré qu’il ne parlerait « jamais » à « quelqu’un comme » lui.
Une décennie plus tard, le dirigeant turc a été accueilli avec les honneurs par son homologue égyptien à son atterrissage à l’aéroport du Caire.
Les deux hommes ont ensuite signé plusieurs accords, plaidant tous deux pour « une nouvelle étape dans les relations », une augmentation des échanges commerciaux « à 15 milliards de dollars par an sous quelques années » et une coopération diplomatique au Moyen-Orient et en Afrique.
Si le torchon a longtemps brûlé – l’Égypte et la Turquie soutiennent deux gouvernements rivaux en Libye et ne se sont que récemment réconciliés sur le dossier soudanais -, les relations commerciales sont restées au beau fixe : Ankara est le cinquième partenaire commercial du Caire.
« L’Égypte est actuellement le premier partenaire commercial de la Turquie en Afrique », s’est félicité le président égyptien mercredi.
« Occupation et massacres »
Lundi, Recep Tayyip Erdogan avait affirmé se rendre aux Émirats arabes unis puis en Égypte pour « voir ce qui peut être fait de plus pour nos frères à Gaza », petit territoire palestinien frontalier de l’Égypte pilonné sans répit par Israël depuis l’attaque meurtrière sans précédent du Hamas contre le sud du pays le 7 octobre.
Le président turc avait ajouté qu’Ankara faisait « tout pour arrêter le bain de sang », alors que plus de 28 000 Palestiniens ont été tués, en grande majorité des civils, selon le gouvernement du Hamas, dans l’offensive lancée dans la bande de Gaza par Israël en représailles à l’attaque.
L’attaque du 7 octobre a entraîné la mort de plus de 1 160 personnes côté israélien, en majorité des civils tués ce jour-là, selon un décompte de l’AFP réalisé à partir de données officielles israéliennes.
Selon Israël, 130 otages se trouvent encore à Gaza, dont 29 seraient morts, sur environ 250 personnes enlevées le 7 octobre. Une trêve d’une semaine fin novembre avait permis la libération de 105 otages en échange de 240 Palestiniens détenus par Israël.
Recep Tayyip Erdogan a dénoncé mercredi « la politique d’occupation et de massacres du gouvernement de Benjamin Netanyahu », le Premier ministre israélien.
Évoquant Rafah, la ville du sud de la bande de Gaza sur laquelle l’armée israélienne menace de lancer une offensive, Erdogan a exhorté la communauté internationale à « ne pas laisser se produire une telle folie qui mènera au génocide ».
Aide humanitaire
Abdel Fattah al-Sissi, lui, a dénoncé « les obstacles d’Israël qui font que l’aide humanitaire entre trop lentement à Gaza ».
L’Égypte tient l’unique ouverture de Gaza sur le monde qui ne soit pas contrôlée par Israël : le terminal de Rafah. Tous les autres points de passage sont hermétiquement fermés par Israël.
Si Rafah relie les territoires palestinien et égyptien, les Israéliens exigent de fouiller l’ensemble des camions qui y transitent, ce qui ralentit l’acheminement de l’aide.
Erdogan, qui a qualifié Israël d' »État terroriste » et le Hamas de « groupe de libérateurs », a rappelé début novembre son ambassadeur à Tel-Aviv, tout en jugeant impossible de « rompre complètement » avec Israël.
Avant le 7 octobre, plusieurs dirigeants politiques du Hamas étaient installés à Istanbul. Ils ont discrètement été priés de partir depuis.
Dès le début du conflit à Gaza, Recep Tayyip Erdogan a proposé sa médiation mais les discussions sur des trêves sont jusqu’ici menées par le Qatar et l’Égypte.
Mardi, les directeurs des services de renseignement américain et israélien, le Premier ministre qatari et des dirigeants égyptiens ont discuté au Caire des moyens pour « œuvrer à une trêve dans la bande de Gaza ».
Ces discussions, qui portaient aussi sur une nouvelle libération d’otages, ont été « positives » et doivent se poursuivre jusqu’à vendredi, a rapporté une télévision proche du renseignement égyptien.