Alors qu’une centaine de frappes turques ont visé les territoires contrôlés par l’administration autonome kurde, en riposte à l’attentat mené à Ankara le 23 octobre, le commandant des Forces démocratiques kurdes dément toute implication ce dimanche 27 octobre, auprès de l’« AFP ».
Ouest-France, le 27 octobre 2024
Il l’assure, les forces dirigées par les Kurdes en Syrie n’ont « aucun lien avec l’attaque d’Ankara ». Leur chef, Mazloum Abdi, a démenti ce dimanche 27 octobre 2024 auprès de l’AFP toute responsabilité dans le récent attentat commis près d’Ankara, comme l’affirme la Turquie. Le parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), en lutte armée contre les autorités turques depuis 1984, a revendiqué l’attaque, qui a fait cinq morts, outre les deux assaillants, et 22 blessés.
Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a affirmé vendredi 25 octobre que les deux auteurs d’un attentat contre le siège des Industries de défense de Turquie près d’Ankara « se sont infiltrés » depuis la Syrie. « La Turquie n’a aucune preuve soutenant ses allégations, et nous n’avons aucun lien avec l’attaque d’Ankara », a défendu à l’AFP, Mazloum Abdi, chef des Forces démocratiques syriennes (FDS). « Nous avons ouvert une enquête, et je peux assurer qu’aucun des assaillants n’est entré en Turquie depuis le territoire syrien », a-t-il ajouté.
Des frappes visant à « affaiblir l’administration autonome kurde »
La Turquie a riposté à l’attentat en bombardant des « cibles du PKK » dans le nord de la Syrie et en Irak. Selon Mazloum Abdi, les frappes sur le nord-est de la Syrie « ont fait 17 morts, dont deux militaires, le reste étant des civils ». L’Observatoire syrien des droits de l’Homme, basé au Royaume-Uni mais qui dispose d’un vaste réseau de sources en Syrie, a estimé qu’une centaine de frappes ont visé les territoires contrôlés par l’administration autonome kurde. L’ONG a aussi affirmé que des infrastructures civiles, dont des silos, des boulangeries, des centrales électriques et des installations pétrolières, outre des positions des forces kurdes, avaient été ciblées.
La Turquie considère les Unités de protection du peuple kurde (YPG), qui dominent les Forces démocratiques syriennes, comme une émanation du PKK, qu’elle qualifie de « groupe terroriste ». L’objectif de ces frappes « n’est pas simplement de riposter à ce qui s’est produit à Ankara […] mais d’affaiblir l’administration autonome kurde, pour l’annihiler et poussant les habitants à partir », a assuré Mazloum Abdi. Selon le commandant des Forces démocratiques syriennes, « l’État turc profite des événements en cours au Moyen-Orient, l’attention se concentrant sur Gaza, le Liban et l’attaque israélienne contre l’Iran », pour « poursuivre ses attaques » contre les zones kurdes de Syrie. « Nous sommes prêts à résoudre les problèmes avec la Turquie par le dialogue, mais pas sous la pression d’attaques », a-t-il ajouté.
Inquiétude face aux prochaines élections américaines
Dans un pays morcelé par 12 ans de guerre, les Forces démocratiques syriennes contrôlent une zone semi-autonome kurde où sont également déployées des forces américaines, plus gros contingent de la coalition internationale anti-djihadistes en Syrie. Le responsable kurde a par ailleurs critiqué ses alliés américains pour avoir failli à protéger les forces kurdes, affirmant que la position de la coalition internationale anti-djihadiste était « faible ». Les forces kurdes jouissent de l’appui de Washington, également allié d’Ankara au sein de l’Otan.
« Leur réponse n’est pas au niveau requis pour arrêter les attaques, et des pressions doivent être exercées sur la Turquie », a-t-il ajouté, affirmant que les frappes sur la Syrie « ne nous concernent pas seulement, mais affectent également leurs forces ». Le commandant des Forces démocratiques syriennes a par ailleurs exprimé son inquiétude face aux prochaines élections américaines de novembre, estimant qu’une élection de Donald Trump pourrait affaiblir le soutien de Washington aux FDS. « En 2019, nous avons eu une expérience infructueuse avec l’administration du président américain Trump », a-t-il dit.
Ankara a lancé sa dernière offensive majeure en Syrie en octobre 2019, quand le président américain de l’époque, Donald Trump, avait affirmé que les soldats américains avaient accompli leur mission en Syrie et se retireraient. « Mais nous sommes confiants que les États-Unis […] prennent leurs décisions » sur la base de leurs « intérêts stratégiques » dans la région, a-t-il encore dit.