Une hausse spectaculaire du salaire minimum en Turquie en ce début d’année. Plus 49%. Il atteint désormais 17 002 livres turques soit environ 520 euros. Mais cette hausse risque d’être rapidement grignotée par l’hyperinflation qui continue à assommer le pays.
Le 9 janvier 2024, France Info.
Près de 50% de hausse ce 1er janvier après deux augmentations qui l’avaient fait doubler l’an dernier… le gouvernement turc n’a eu de cesse d’augmenter le salaire minimum. Mais il permet tout juste à une famille de 4 personnes d’atteindre le seuil de la faim. Sans parler du seuil de pauvreté, estimé à 47 000 livres. Dans une famille de 4 personnes, il faudrait que 3 travaillent au salaire minimum pour se maintenir au-dessus de la pauvreté. Or, c’est irréaliste, notamment parce que le chômage reste élevé. Et si le salaire minimum permet à peine de survivre, c’est parce qu’il a beau galoper, il ne galope pas aussi vite que l’inflation. Estimée à près de 65% par le gouvernement pour 2023, en fait le double selon les économistes indépendants. Et tous les économistes prévoient que malgré cette nouvelle hausse, ce salaire minimum sera rapidement grignoté en raison de la vertigineuse hausse des prix qui ne connaît aucun répit.
Tenir jusqu’aux élections du 31 mars
Le gouvernement espère tenir jusqu’à fin mars, date des élections municipales qu’il entend remporter. Mais il n’est même pas sûr qu’il puisse éviter une profonde érosion du pouvoir d’achat avant le scrutin. Dès ce mois ci la hausse de l’alimentation a de nouveau mis les ménages à genoux. Plus de 100% l’an dernier, la Turquie est le 4ème pays au monde où les prix de l’alimentation ont le plus augmenté. Le riz devient un produit de luxe, le lait pour enfant est mis sous clefs dans les rayons des supermarchés.
Selon les syndicats, qui réclamaient au moins 18 000 livres, le gouvernement devrait revoir le niveau du salaire minimum quatre fois par an pour s’adapter à l’inflation mais le président Erdogan a annoncé qu’il n’y aurait désormais qu’une seule hausse par an le 1er janvier. Ce qui laisse présager des lendemains très difficiles dans quelques mois.
Or le salaire minimum est un vrai indicateur du niveau de vie en Turquie. Il concerne près de 40% de la population active. On parle même de 70% des travailleurs du privé payés au salaire minimum.
Le salarié turc s’appauvrit
En fait le gouvernement marche sur une corde raide. Il veut maîtriser le niveau des salaires pour contenir l’inflation. Il a dans le même temps entamé une véritable révolution économique de hausse des taux d’intérêt, passés de 8,5 à 42,5% l’an dernier. Mais cela n’a pas suffi à enrayer la chute de la monnaie ou la hausse des prix. Et ces taux ne vont pas pouvoir monter beaucoup plus, La population vit à crédit, et toute hausse ampute aussi encore son pouvoir d’achat.
Le salaire minimum turc a en outre dégringolé par rapport à ses voisins Jusqu’en 2015 un travailleur turc gagnait plus qu’un Polonais, un Roumain ou un Hongrois. Mais désormais seules l’Albanie et la Bulgarie payent moins leurs ouvriers. La chute de la livre turque n’y est bien sûr pas étrangère. Mais elle n’est pas la seule responsable. Ce pourrait être un calcul pour rendre la main d’œuvre turque compétitive. Mais ce calcul a échoué, les importations ont davantage augmenté que les exportations, et la production locale turque dépend de plus en plus également de matières premières importées, et importe aussi son énergie. Résultat, les salariés se sont appauvris sans que l’économie ne bénéficie des bas salaires.