RFI, 27 juin 2021, Cerise Sudry-Le Du
À Istanbul, ce samedi 26 juin, c’était la marche des fiertés. Alors que le gouvernement turc s’en prend systématiquement à la communauté LGBT – on se souvient qu’un ministre du gouvernement Erdogan avait traité quelques opposants LGBT de « détraqués » – la marche a été très bousculée. Après de nombreuses échauffourées, la manifestation a quand même pu se tenir, pour un temps, dans les rues adjacentes.
C’est peu dire que la police était sur les dents : 1h30 avant la manifestation, toutes les rues adjacentes au défilé ont été coupées par des barrages. La police a arrêté une vingtaine de personnes, n’hésitant pas à traîner certains manifestants sur le sol.
Les signes arc-en-ciel ont été systématiquement confisqués par la police. Alors Nesrin, 36 ans, a mis une petite robe rouge car pour elle, il n’était pas question de ne pas être colorée. « Être gay, c’est presque interdit ici ! Tout ce qui avait des couleurs arcs en ciel a été confisqué. La seule existence des personnes LGBT, ça les dérange… », dit-elle.
Pendant deux heures, les manifestants ont joué au chat et à la souris avec la police, courant dans les rues escarpées de ce quartier d’Istanbul. En dessous de sa chemise léopard, Yusuf, 22 ans, montre une longue traînée violette le long de sa clavicule. « Ça ? C’est la violence policière. Dans ce chaos, on n’avait nulle part où fuir. Et j’ai été attrapé à la gorge », constate-t-il.
Un photographe de l’AFP interpellé
Après 1h30, les manifestants ont réussi à défiler à marche rapide dans les rues, abordant quelques drapeaux arc-en-ciel. Mais ils ont vite été rattrapés et 40 personnes ont été placées en garde à vue.
Lors de cette manifestation, un photographe de l’AFP, Bülent Kiliç a été interpellé pendant qu’il couvrait la « marche » d’Istanbul. L’homme a finalement été libéré samedi soir La direction de l’AFP a protesté contre « la violente interpellation » de son photographe « alors qu’il ne faisait qu’accomplir son travail de journaliste ». L’ONG Reporters sans frontières (RSF) en Turquie a également condamné cette arrestation.
Après une spectaculaire marche des fiertés qui a réuni en 2014 plus de 100 000 personnes à Istanbul, les autorités turques l’ont interdite année après année, officiellement pour des raisons de sécurité. Les associations LGBT dénoncent une « campagne de haine » orchestrée depuis des années à leur encontre par le gouvernement turc, au risque d’encourager les violences contre une communauté particulièrement vulnérable.