Observatoire de la Turquie Contemporaine, 18 juin 2021, image: MA
Pour protester contre le retrait turc de la Convention d’Istanbul des milliers de femmes venus des quatre coins de la Turquie se réuniront dans le district de Maltepe le 19 juin. Par ce retrait le président Erdogan déclare en substance que la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes n’est pas nécessaire en Turquie. Geste plutôt ironique lorsqu’on pense qu’au moins 300 femmes ont été assassinées en 2020 (en majorité par leur partenaire), que 171 femmes ont été retrouvées mortes dans des circonstances qui permettaient de suspecter un homme proche de la famille.
La Turquie a ratifié la Convention dite d’Istanbul en 2012. Ce traité « crée un cadre juridique complet et une approche pour lutter contre la violence à l’égard des femmes ».Le texte se concentre sur la prévention de la violence domestique, la protection des victimes et la poursuite des auteurs.. Il couvre non seulement la violence domestique mais aussi d’autres formes de violence, notamment les abus psychologiques, le harcèlement sexuel, le viol, la traque et le mariage forcé, les crimes commis au nom de l »honneur ». La Convention contient également une définition du genre : aux fins de la Convention, le genre est défini à l’Article 3 (c) comme « les rôles, comportements, activités et attributs socialement construits qu’une société donnée considère appropriés pour les femmes et les hommes ». « Les États qui ratifient la Convention doivent incriminer plusieurs infractions, notamment la violence psychologique (Article.33), le stalking (Article.34), la violence physique (Article.35), la violence sexuelle, y compris le viol, couvrant explicitement tout engagement dans des actes non consentis de nature sexuelle avec une personne (Article.36), le mariage forcé (Article.37), les mutilations génitales féminines (Article.38) et l’avortement forcé et stérilisation forcée (Article.39). La Convention stipule que le harcèlement sexuel doit faire l’objet de « sanctions pénales ou autres sanctions légales » (Article.40). Lire plus sur le texte de la Convention
Intitulée « Nous n’abandonnons pas la Convention d’Istanbul » la manifestation est soutenue par 88 organisations de femmes. Le communiqué de presse de la manifestation déclare « Nous n’abandonnons pas la Convention d’Istanbul ». » Le retrait de la Turquie de cette Convention est due à la décision d’une seule personne.(…). Nous ne reconnaissons pas cette décision illégale qui vise les droits des femmes et des LGBTI à être protégées contre la violence. Parce que nous savons que ceux qui souhaitent anéantir la Convention d’Istanbul devenue l’instrument de notre lutte pour l’égalité des droits, veulent aussi anéantir notre lutte contre l’inégalité, la violence, le meurtre, le harcèlement, la maltraitance des enfants, la discrimination, les discours de haine, la politique de guerre, la polarisation, l’usurpation de notre travail et la fabrication de prisons à partir de nos maisons, de nos rues et de nos lieux de travail. «
Il faut rappeler que le mouvement des femmes est dans la Turquie d’aujourd’hui un mouvement des plus dynamiques et qui s’exprime malgré les limitations drastiques des libertés.