« Le salaire minimum en Turquie, confrontée à une inflation de plus de 84% sur un an, sera relevé au 1er janvier à 8.500 livres turques (TRY) net (environ 455 dollars), pour la troisième fois en un an, a annoncé jeudi 22 décembre le président Recep Tayyip Erdogan » rapporte Le Figaro du 22 décembre 2022.
Plus de 40% des Turcs vivent avec le salaire minimum. Ce dernier s’établissait à 2.826 livres fin décembre 2021, soit un peu moins de 300 dollars à l’époque. Il avait été relevé à 4253 TRY en janvier dernier et à 5.500 en juillet, à un niveau insuffisant pour vivre dans les grandes villes comme Istanbul.
«Période critique»
Reconnaissant que le pays traverse une «période critique», à moins de six mois des élections présidentielles et législatives prévues au printemps prochain, M. Erdogan a promis le «déclin rapide de l’inflation dès la fin du mois». «Nous sommes déterminés à réduire l’inflation de 20% d’ici la fin de l’année prochaine», a-t-il promis.
Les syndicats avaient réclamé 9.500 TRY par mois mais le chef de l’État a indiqué qu’il n’avait pas été possible de parvenir à un accord. «Après une série de rencontres, hélas, employés et employeurs n’ont pu se mettre d’accord sur un montant» a déclaré le président jugeant le «compromis raisonnable».
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La hausse des prix à la consommation a déjà ralenti en novembre en Turquie pour la première fois depuis mai 2021, à 84,4% sur un an contre 85,5% le mois précédent, selon les données officielles. Un groupe d’économistes indépendants estime cependant que le taux d’inflation réel s’élève à plus du double, tandis que la monnaie turque a perdu près de 30% de sa valeur sur l’année écoulée.
La banque centrale turque a gardé jeudi son principal taux directeur stable à 9%, après quatre mois de baisses consécutives, suivant le souhait du président turc et malgré l’inflation. À rebours des théories économiques classiques, le chef de l’État, qui cherchera à être réélu en juin prochain, affirme que les taux d’intérêt élevés favorisent l’inflation.
Une croissance ralentie
vec une inflation à 84,39%, les banques risquent de perdre sur un an 75,39% de la valeur d’un prêt effectué au taux d’intérêt officiel. Selon des observateurs, cet écart risque de paralyser les prêts et de ralentir considérablement la croissance en Turquie.
«La croissance économique continuera de ralentir au premier semestre de l’année prochaine, et il est très possible que le président Erdogan fasse pression sur la (banque centrale) pour qu’elle assouplisse encore plus sa politique avant les élections de l’année prochaine», a estimé Nicholas Farr, de Capital Economics, dans une note envoyée à ses clients.
Selon l’analyste, les tentatives du gouvernement turc pour inciter les exportateurs à vendre des dollars et des sources de financement internationales ont contribué à stabiliser la livre turque ces derniers mois. «Mais ce n’est pas viable et nous prévoyons qu’elle chutera d’environ 20% par rapport au dollar d’ici fin 2023», a ajouté l’analyste.
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Le Figaro, 22 décembre 2022, Photo/Rita Franca/Nurphoto | Getty Images