En Turquie, la nasse se resserre sur l’opposition et le monde de la culture/Marie-Pierre Vérot/FRANCE INFO

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FranceInfo, le 16 février, 2025

On assiste ces dernières semaines à une offensive judiciaire et policière sur le monde de la culture, en Turquie. Il y a eu l’arrestation, début février, de l’actrice qui avait incarné une combattante du PKK, la guérilla kurde, dans un épisode de la série française Le Bureau des légendes. Poursuivie pour « propagande terroriste » en raison du costume qu’elle portait s’apparentant à celui du PKK, terroriste pour Ankara. 

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Mais il faut aussi signaler l’arrestation d’une agente de stars en vue, qui aurait incité ses acteurs à prendre part aux manifestations de Gezi, contre le gouvernement… il y a plus de 11 ans ! Sans oublier un auteur kurde, Yavuz Ekinci, poursuivi pour des propos que tient l’un de ses héros dans un roman publié il y a plus de dix ans. Il a mis le procureur au défi d’arrêter ses personnages de fiction.

On voit donc à quel point l’AKP, le parti au pouvoir, et celui qui se révèle de plus en plus son bras armé, le procureur d’Istanbul, menacent le monde culturel. Mais dans le même temps, les coups de filet se multiplient aussi contre les journalistes, et pas seulement kurdes : également ceux de grands médias d’opposition comme Halk TV ou Bir Gün.

Les responsables politiques d’opposition particulièrement ciblés 

De nombreux maires kurdes, élus lors des dernières municipales, ont été arrêtés et remplacés par des administrateurs nommés par le pouvoir. Mais c’est sur le CHP, le parti républicain du peuple, premier parti du pays et fer de lance de l’opposition, que le pouvoir concentre désormais ses attaques. Plusieurs élus municipaux, maires ou maires adjoints de grands arrondissements d’Istanbul sont poursuivis ou déjà arrêtés, notamment ceux d’Esenyurt, de Besiktas, dans différentes affaires. 

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Le message est clair : l’étau se resserre autour du maire d’Istanbul, Ekrem Imamoglu. Il ne s’y est pas trompé, sa dernière apparition au tribunal d’Istanbul a viré au meeting électoral contre le pouvoir, sur le parvis même du palais de justice. Les poursuites judiciaires se multiplient d’ailleurs à son encontre sur divers fronts. Prochaine audience le 11 avril. Le procureur réclame peines de prison et interdiction d’exercer des mandats publics. Diviser l’opposition, neutraliser ses potentiels candidats à la présidentielle : c’est bien l’objectif qui semble se dessiner alors que l’on parle de plus en plus ouvertement d’élection anticipée.

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