Libération le 20 avril 2025
Les tracteurs s’en mêlent. Une centaine d’engins agricoles ont bloqué ce samedi 19 avril des routes dans le centre de la Turquie, se joignant à une nouvelle manifestation antigouvernementale organisée par le principal parti d’opposition, le CHP social-démocrate.
Le rassemblement dans la ville de Yozgat a eu lieu un mois après l’arrestation du populaire maire d’opposition d’Istanbul, Ekrem Imamoglu, plus grand rival politique du président Recep Tayyip Erdogan. Cette arrestation a déclenché les plus importantes manifestations que la Turquie ait connues en dix ans et a entraîné une répression des autorités qui ont arrêté près de 2 000 personnes.
«Nous ne vous laisserons pas écraser ces agriculteurs»
Si les manifestations de grande ampleur se sont calmées, le pays connaît encore des protestations d’étudiants d’universités et de lycées, tandis que le dirigeant du CHP, Ozgür Ozel, appelle à des rassemblements hebdomadaires à travers la Turquie. Casquette vissée sur la tête, Ozel a lui-même conduit un tracteur à Yozgat, en tête de convoi. Des milliers de manifestants brandissant des drapeaux se sont rassemblés dans ce fief agricole profondément conservateur qui a longtemps soutenu le parti islamo-conservateur AKP du président Erdogan et ses alliés nationalistes.
Ils ont scandé «Gouvernement, démission !» selon des images mises en ligne par plusieurs médias d’opposition. «Je préviens les autorités qui considèrent les habitants de Yozgat comme des fourmis et tentent de les écraser : nous ne vous laisserons pas écraser ces agriculteurs qui travaillent dur !», a lancé Ozgür Ozel face à la foule.
«L’avenir de la Turquie, ce sont les étudiants»
En mars, une douzaine d’agriculteurs locaux ont été condamnés à une amende pour avoir organisé une manifestation avec des tracteurs après l’arrestation d’Imamoglu et la rafle de jeunes manifestants. «Le gouvernement fait pression sur les étudiants, mais l’avenir de la Turquie, ce sont les étudiants, n’est-ce pas ?», a déclaré un conducteur de tracteur à l’agence de presse Anka, sans donner son nom.
Lors du rassemblement, les organisateurs ont lu une lettre de Ekrem Imamoglu appelant à des élections anticipées. «Si le gouvernement convoquait des élections anticipées aujourd’hui, l’économie se remettrait sur les rails», écrit-il dans un appel à ceux qui ont voté pour l’AKP d’Erdogan ou pour son allié nationaliste, le MHP.