Trois ans après que le président Erdogan a retiré son pays de la convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes – plus connue sous le nom de convention d’Istanbul – les féministes s’alarment de la hausse du nombre de féminicides. Leur mouvement est de plus en plus mobilisé, et de plus en plus jeune.
Pour Sevinç Alim, avoir 20 ans et être féministe en Turquie, « c’est réaliser que quand une femme ne vit plus, tous les droits qu’on peut acquérir ne servent à rien ! C’est donc lutter en priorité pour le droit à la vie ».
Sevinç appartient à la branche jeunesse de la plateforme « Nous stopperons les féminicides ». Et il y a du travail : en octobre, au moins 48 femmes ont été tuées par un homme, le record mensuel depuis 2010. « C’est simple : depuis que nous recensons les féminicides, la seule année où leur nombre a baissé, c’est en 2011 – l’année où la Turquie a signé la convention d’Istanbul », tance la jeune femme.
« Un climat qui encourage les meurtriers »
Et d’année en année, la situation n’a cessé de se dégrader depuis que la Turquie s’est retirée de la convention d’Istanbul. « Ce retrait, allié à une politique d’impunité et à un discours officiel sexiste qui défend la famille plutôt que les femmes, a créé un climat qui encourage les meurtriers », estime-t-elle.
La jeune femme, pourtant, refuse de désespérer : « C’est quand tu es seule que tu te sens impuissante et que tu désespères. Quand j’ai rejoint la lutte féministe, j’ai pris conscience de l’importance de ce mouvement, de son ancienneté, et de tout ce que – malgré tout – nous avions réussi à obtenir. »
Et en ce 25 novembre, les ONG entendent bien faire entendre leurs voix. À l’occasion de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, les organisations féministes de Turquie appellent à des rassemblements dans les principales villes. Toutefois, elles s’attendent à ce que, comme chaque année, la police les empêche de manifester.